La succession de Pascal Lamy à la tête de l’Organisation mondiale du commerce (OMC) a commencé, mardi 29 janvier, avec la présentation des neuf candidats devant le Conseil général de l’OMC, à Genève.
Trois d’entre eux sont des Latino-Américains : Anabel Gonzalez, ministre du commerce extérieur du Costa Rica, Roberto Azevêdo, ambassadeur du Brésil auprès de l’OMC, et le Mexicain Herminio Blanco, ancien négociateur des traités de libre échange du Mexique avec les Etats-Unis et le Canada (l’Accord de libre échange nord-américain, Alena), avec l’Union européenne (UE), une dizaine de pays d’Amérique latine, le Japon et Israël.
Alors que les pays d’Amérique latine et des Caraïbes viennent de proclamer leur unité au sommet de Santiago du Chili, la course dans le désordre pour la direction de l’OMC montre leurs différences persistantes et la difficulté d’apparaître comme un bloc soudé sur la scène internationale.
Une "short list" doit être soumise en avril à la considération des 159 pays membres de l’OMC.
Le Costa Rica et le Brésil ont engagé une campagne pour soutenir leurs candidats respectifs.
Le diplomate brésilien espère rallier les émergents du BRICS (Brésil, Russie, Inde, Chine et Afrique du Sud). Ce n’est pas la première fois que le Brésil aspire à diriger l’OMC (le précédent candidat était aussi un ambassadeur, Luiz Felipe Seixas Correa). Selon le journaliste Clovis Rossi, du quotidien Folha de São Paulo, le principal handicap de l’ambassadeur Azevêdo est le protectionnisme brésilien. Or, l’OMC est vouée à la libéralisation du commerce.
Anabel Gonzalez a plusieurs atouts : d’être une femme, ce qui n’est pas négligeable par les temps qui courent, de connaître parfaitement l’OMC de l’intérieur et de l’extérieur, puisqu’elle a exercé des responsabilités dans l’organisation et y a représenté le Costa Rica, d’avoir une expérience politique, et pas seulement diplomatique. En outre, elle vient d’un petit pays, qui a relevé le défi de l’intégration à l’économie globale.
De passage récemment à Paris, elle se fait l’avocate des pays moins avancés, qui peinent à trouver leur place dans le commerce mondial.
"Plus de la moitié du commerce international est assurée par les pays en développement, confie-t-elle. Cependant, il y a encore des pays dont la participation est réduite. Le rôle de l’OMC est de les aider davantage. Les problèmes ne viennent pas seulement des barrières douanières. Le Rwanda, par exemple, ne dispose pas d’accès à la mer : comment franchir cet obstacle ?"
A son avis, "l’OMC doit augmenter les contrôles et la vigilance contre le protectionnisme comme réponse à la crise". L’OMC doit aussi redoubler d’efficacité pour la solution des conflits : plus de transparence et de respect des normes. Il faut encore se pencher sur de nouvelles problématiques, telle que le changement climatique : "comment contribuer à la libéralisation des services et des biens écologiques, promouvoir l’économie verte ?" Le Costa Rica est connu pour son engagement pionnier dans la protection de l’environnement et de la biodiversité, tandis que le Brésil prête le flanc aux critiques des écologistes.
Anabel Gonzalez croit à "la convergence entre les intégrations régionales et l’ouverture des marchés". Elle en veut pour preuve l’Amérique centrale, dont l’intégration, bien plus avancée que celle de l’Amérique du Sud, a favorisé une croissance soutenue du commerce depuis vingt ans. "Aussi bien l’intégration que le multilatéralisme sont des instruments, et pas des buts en soi, affirme la ministre costaricaine. L’objectif est de stimuler la croissance et le développement." D’ailleurs, l’intégration dépasse les frontières géographiques, la distance est devenue secondaire pour le commerce et l’investissement.